Le numérique : pas de solution miracle en pédagogie !

La région PACA Sud a sollicité les lycées, lycées professionnels et lycées agricoles pour connaitre leur choix de types de manuels pour la rentrée prochaine. Le Conseil Régional PACA entend passer au « tout numérique » et équiper les lycéens de tablettes en lieu et place des manuels papiers. Pour que la profession puisse avoir en main les éléments de réflexion à l’heure du choix, le Snes-FSU a rencontré la direction régionale des lycées mercredi 23 janvier. Nous avons salué la décision renouvelée par la Région de la gratuité des manuels. Le choix du support sera laissé aux équipes, mais il ne sera pas possible de conserver les deux versions de manuels, il faudra choisir entre le papier ou le numérique, et ce pour cinq ans.

Même si le choix est fait du manuel numérique dans un EPLE, l’équipement à la rentrée restera compliqué et l’équipement en carte SD (manuels chargés et transférables) renvoyé à la rentrée 2020 ce qui supposera un simple téléchargement en ligne des manuels pour l’année scolaire 2019-2020.

Les tablettes (sans doute 10 pouces) seraient fournies connectables avec l’ENT, avec la plateforme ATRIUM et les ressources CORRELYCE ainsi que des applications. Elles seraient fournie avec une coque résistante et deviendrait la propriété de l’élève après signature d’une convention avec les familles, sorte de charte de « bon usage ». Celle-ci supposera que les familles s’engagent à prendre en charge assurance et maintenance du matériel, ce qui n’est pas neutre financièrement. Comme le Conseil Régional PACA s’orienterait vers l’achat de tablettes de gamme moyenne, il y a fort à craindre qu’elles seront rapidement endommagées ou obsolètes.

Il y a bien longtemps que l’informatique sert d’outil dans les collèges et lycées (quand l’équipement le permet), mais il n’est pas, heureusement, l’alpha et l’oméga de toute pédagogie. De toute façon, la liberté pédagogique des professeurs leur laisse le choix des supports pédagogiques.

Le numérique n’est qu’un outil, pas une fin en soi et doit être mis au service de la pédagogie. Un élève qui s’ennuie se lassera aussi de sa tablette. Les enseignants ayant pratiqué ce type d’outils se plaignent tous du désordre engendré dans les classes : élèves surfant sur internet, batteries déchargées, casse, cohue pour recharger les tablettes, etc.

Des études menées en collège montrent l’impact de l’usage des tablettes sur le mode de réflexion des élèves. Ainsi cela les habituerait à un seul mode de lecture linéaire des documents, qui défilent page par page. Ce type d’approche freine une démarche plus globale et analytique des documents ; difficile dans ces conditions de prévoir un travail séquentiel.

Enfin, il n’y a pas de crédits prévus pour permettre l’installation de bornes de rechargement électrique. La Région renvoie donc au règlement intérieur de chaque EPLE. Ainsi la charte informatique devrait intégrer, par exemple, que les élèves arrivent avec leur tablette chargée chaque matin et que les établissements s’engageraient à déconnecter le WI-FI à la demande des enseignants. En revanche, la mise en place de quelques bornes hot-spot Wifi dans « quelques » EPLE est prévue.

La question de l’impact environnemental du « tout numérique » est aussi à mettre dans la balance.
En tout état de cause, il ne s’agit pas de voir l’innovation d’un côté et le refus du progrès de l’autre. La réalité est beaucoup plus complexe. Ce sont les équipes qui doivent s’emparer des tous ces éléments pour choisir et c’est le conseil d’administration qui doit se prononcer, par un vote, sur cette question qui relève de la pédagogie !
Fabienne Langoureau, co-secrétaire générale du SNES-FSU